Volontairement ou non, nous utilisons parfois des mots, des expressions et des manières de parler qui, au delà des apparences, disent à bas bruit ce qu’elles sont censées ne pas dire…
Depuis déjà quelques temps nous avons bien compris, par exemple, que le mot « territoire » donne l’illusion de l’ancrage, de l’enracinement mais qu’il a en fait pour fonction de faire croire à cet enracinement et permet de parler avec une merveilleuse imprécision d’une réalité tout à fait indéfinie. Le territoire est à géométrie variable, à frontières mobiles, tellement imprécises que le territoire devient virtuel en faisant croire qu’il ne l’est pas. Restera à le connecter pour qu’il se fasse apprenant ou inclusif, territoire de soin ou de santé, au gré de celui qui parle…
De la même manière nous communiquons désormais par écrans interposés… Réjouissons-nous ! Les écrans sont partout, multiples, actifs, ils sont censés relier, mettre en relation dans toutes les circonstances de la vie et toutes les catégories de communicants : les enseignants et leurs élèves ou étudiants (téléenseignement), les malades et leurs médecins (télémédecine), les commerçants et leurs clients (téléachats, click and collect)… Le télétravail se répand, les réunions virtuelles sont innombrables, les visio-conférences et webinaires remplacent le présentiel, la distance est au service de la proximité… On n’arrête pas le progrès et l’on est parfois surpris que tout cela engendre une sorte de perte de la relation, la vraie, celle qui fait du bien, qui soigne, qui éduque, qui fait grandir chacun avec les autres et au profond de soi…
L’écran fait écran, tout simplement… faisant écran, il tient à distance ceux qu’il est censé rapprocher…
Mais tout cela, rassurez-vous, en toute « transparence » ! Ah bon ! Circulez il n’y a rien à voir… Le sommet de la transparence c’est bien l’invisibilité de la vitre… C’est la lisibilité qui pourrait donner à voir, à lire et à comprendre… rendre lisible et non pas transparent, imperceptible…
Mais, bien sûr, on préfère parfois ne pas vraiment donner à voir… Alors on vous dira partout, jusqu’à l’hôpital et dans les soins qu’il est très important de servir une irréprochable « démarche qualité »… On mettra alors en œuvre une multitude de protocoles et de « bonnes pratiques ». Tant mieux, tous, nous préférons les bonnes pratiques aux mauvaises ! Et l’on oubliera très vite que l’important n’était pas la démarche qualité mais bien la qualité de la démarche…
Dans cette période de pandémie où le port du masque est devenu obligation, on le porte donc pour se protéger et protéger les autres. Soit ! Mais que masque donc le masque ? Que révèle-t-il au fond ? Sans doute une virtualisation de la relation, un isolement au motif de confinement et un enfermement des plus vieux ou des plus handicapés au motif de leur vulnérabilité…
Alors, comble de l’hypocrisie collective, les personnes âgées accueillies dans les EHPAD ou les personnes en situation de handicap accueillies dans les Foyers d’hébergement, sont gentiment appelées « résidents » !
On imagine tout de suite derrière ce terme la prise en considération de la personne et la déférence qu’on leur témoigne, dans le respect de leur projet de vie, conformément au projet institutionnel qui s’inscrit d’ailleurs dans le projet du territoire que nous évoquions tout à l’heure… Soit ! Mais, confinement aidant, certes, il faudra alors expliquer pourquoi ces « résidents » ont été tout simplement assignés… à résidence, pour ne pas dire « placés » en liberté… surveillée ! Comment s’étonner alors qu’un peu partout on entende encore parler de « pensionnaires » ! Qu’il ne leur prenne pas l’idée de partir ils auraient fait une « fugue »…
Alors tout et son contraire ? Peut-être, ou inversement, je ne sais plus…
Michel Billé
Hum bien vrai Michel.
Mais pas besoin d’être en résidence pour être niée en tant qu’être « pensant ».,, après 70 ans ont été qui ?..
J’ai rencontré une jeune toubib remplaçante de la généraliste qui elle est attentive et empathique. En congés maternité elle a donc des remplaçantes. La première vu en septembre rien à dire. Elle a rempli sa mission avec attention et écoute.
La deuxième, petite bonne femme très sure d’elle et de son savoir mais,…
Elle m’a fait un Courrier pour un spécialiste et a écrit des choses erronées et bien sûr ne m’en a pas parlé. Pensez donc,…
On verra ce que dira le dit spécialiste qui est à 10 ans près de la même veine..
À 74 ans peut on attendre au minimum écoute et respect ????
Où alors plus d’hypocrisie et distribution de pilule de curare…!!!!
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Qu’on ne me parle plus de « plan de soins » ou (pire) « projet de vie » … J’ai vu, de mes yeux vu, un médecin coordonnateur qui complétait toutes les cases sur le résident. La réunion collective ne servait qu’à faire valider les cases emplies d’un seul avis (médecin ne connaissant guère les résidents) : nous étions seulement requises pour signer le document. Ensuite l’établissement pouvait mettre en avant le fait que tous les projets de vie avaient été dûment faits pour chacun des résidents !
Je m’étais hasardée à insister sur le fait que, pour certains résidents : leur projet de vie pouvait être tout simplement de mourir sans souffrir (ce qui était loin d’être le cas).
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